En lumière

Rencontre avec Jean-François, coordinateur général

publié le 26 avril 2021

Avec le printemps, de nouvelles pousses arrivent à La RainbowHouse Brussels pour mener les divers projets et missions à bien. Coup d’œil sur les nouve.lles.aux  collaborat.eur.rice.s qui apportent ainsi de nouvelles expériences et énergies au sein de la (dream) team. Avec bientôt de nouvelles réalisations. Welcome !

 

En quelques mots quel est ton parcours et ta personnalité ?

Si je devais le résumer en un, je dirais : l’associatif. Depuis pas mal d’années déjà. S’associer, compagnonner, cheminer ensemble. J’ai une première vie d’artiste, en théâtre. C’est loin. Mais pas juste du divertissement. Plutôt un théâtre engagé qui questionne la société. Bref qui joue un rôle essentiel comme on dit (pas assez) actuellement. J’ai aussi travaillé dans un centre culturel et dans des écoles à Bruxelles.

La dimension sociale s’est révélée ensuite en travaillant avec des adultes ayant un handicap mental puis j’ai fait de la promotion santé et un documentaire en RDC et enfin tout un long chapitre en éducation permanente dans un mouvement militant. Tout le temps un mix entre le terrain et la gestion avec laquelle on doit jongler pour négocier ou simplement subsister.

Je me considère plus généraliste que spécialiste (ou spécialiste en généralités-rire) et suis plutôt quelqu’un de conciliant. J’évite les clivages et mon militantisme est plutôt pragmatique, ce qui ne dispense pas de pouvoir être déterminé dans les luttes poursuivies. J’aime un équilibre entre débat et action aussi.

Pourquoi faire cet interview en cet endroit de Bruxelles ?

Nous sommes donc sur une des berges du canal, à Tour et Taxi, à quelques mètres du pont Suzan Daniel que l’on est en train de poser depuis quelques jours. Pour ma photo d’entrée en fonction -tradition à la RainbowHouse- j’ai souhaité ce symbole fort à plusieurs égards.

Il y a d’abord la volonté de ne pas s’enfermer dans le pentagone bruxellois mais de pouvoir se décentraliser. Ce pont derrière moi participe aussi d’un grand projet de féminisation de l’espace public -auquel on se doit tous de participer quel que soient nos genres- puisqu’il prend le nom d’une personnalité LGBTQI+. Suzan Daniel a été une grande militante lesbienne belge qui a lancé le mouvement gay et lesbien en Belgique dans les années 50.

Le canal est également une séparation entre deux parties différentes de Bruxelles et la symbolique du pont, de la jonction entre des espaces, des groupes différents correspond finalement bien à la représentation que je me fais de la coordination en général et de mon job à la RainbowHouse en particulier.

Le pont Suzan Daniel en constructionLe pont Suzan Daniel en construction

 

En quoi consiste ton travail à la RainbowHouse ?

La coordination générale est d’une grande variété. Depuis l’accompagnement/support d’une chouette équipe, en partie renouvelée, en passant par la gestion des ressources et la recherche de nouveaux moyens, l’accueil téléphonique aussi parfois pour répondre à des demandes d’informations, des inquiétudes, des demandes stages,…. la représentation auprès des partenaires, des administrations, de la presse. De la compta, de la communication et enfin aussi, tâche essentielle, la relation avec les associations membres et l’organe d’administration sans quoi la coupole ne pourrait fonctionner.

Bon, les tâches sont nombreuses mais on peut compter sur une équipe, des bénévoles et des administrateur.trices motivé.e.s et impliqué.e.s et tout ne se fait pas toujours simultanément, heureusement (rire).

 

Quels sont tes projets, ton futur proche, des challenges ?

Avant tout il y a des dossiers prioritaires. Travailler à la stabilisation de l’organisation, sur le plan des ressources. Même après tant d’années d’existence, nous dépendons d’encore beaucoup de ressources aléatoires et peu de structurelles. Il faudrait inverser la tendance. Surtout quand en période d’épidémie les équilibres sont bousculés. C’est aussi fort insécurisant et inconfortable pour les équipes donc renforcer un peu de bien-être ne sera pas du luxe.

Il y aura aussi justement le dossier 20e anniversaire de la coupole, dans quelques mois, au sortir de déconfinement avec divers évènements à organiser et les organisations membres à mettre en avant. Et aussi veiller à la disponibilité de services, sociaux, psy, culturels pour les membres de la communauté LGBTQI+ car au sortir du confinement les besoins seront grands. Notre téléphone chauffe beaucoup.

 

Au niveau des enjeux, je dirai presque qu’ils sont colossaux. Il y a tout d’abord la sortie de confinement et de toutes les remises en question que cela engendre sur nos modes de vie et de penser. Il y a aussi la complexité de porter une parole audible et représentative d’une diversité pas encore toujours, en tous temps et partout visible.

Enfin je dois aussi constamment savoir d’où je parle car j’appartiens pour le moment à une des minorités qui es en fait majoritaire et la plus visible : il faudra beaucoup d’énergie pour là aussi rééquilibrer les choses, éviter les clivages ou les impasses.

Sur le plan politique, je devrai veiller à porter la parole et les revendications des organisations membres avec notre mémorandum à actualiser avec le suivi des plans d’action des différents niveaux de pouvoir. L’actualité a également été chargée et dramatique puisque la veille de mon entrée en fonction, un meurtre homophobe était commis en Flandre et nous a cruellement rappelé que rien n’est acquis pour les LGBTQI+, même en Belgique.

Qu’est ce qui de manière générale te motive/mets en mouvement  ?

Ce qui me met en mouvement vient plutôt ce qui m’indigne. Sinon, c’est l’extase, on lévite (rire). Et parmi les choses qui m’indignent  ou m’affectent, il y a l’exploitation de manière générale et les inégalités qui y sont associées. Souvent par manque d’information des personnes exploitées. C’est d’ailleurs un des ressorts de l’éducation permanente : donner des clefs, des grilles de lecture de la société pour pouvoir s’émanciper, avoir un regard critique et s’affranchir.

Les appels de détresse quotidiens que l’on peut recevoir de personnes, jeunes et moins jeunes qui sont mal en raison de leur identité et du rejet qu’iels peuvent subir sont également un fameux moteur.

Enfin, le rejet de la différence -que ce soit lié à la sexualité, aux identités ou autre- ou plutôt l’impossibilité d’intégrer une multitude de normalités je dirais, car finalement qui est différent de qui ? Cela veut dire quoi ? Par contre, par manque d’information encore ou d’éducation/apprentissages, on en arrive à ne considérer qu’un seul cadre de référence, une norme dominante (la norme hétéro, le modèle patriarcal,….) alors qu’il y a tant d’identités et d’orientations possibles qui peuvent coexister. C’est là que l’associatif que je suis essaie de faire levier, auprès du politique, des médias, de la société en général et à la Rainbowhouse, ça ne manque pas. Un bouillonnement collectif et bienveillant !

Si tu étais un.e héroïn.e ?

Ah la partie Proust c’est ça ? (rire). Oh ben je ne sais pas, je dirai un personnage de manga que j’ai connu durant mon enfance. Albator par exemple. Pour le côté pirate mais en même temps pour le caractère « personnage d’honneur, de parole ». Un peu idéaliste et du coup voyageur aussi. Gare à mon cosmodragon

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