En lumière
Les organisations belges LGBTQI+ s’insurgent contre les convocations de personnes transgenres par la Police
publié le 2 mars 2018
Genres Pluriels
Communiqué de presse
Loi du 25 juin 2017 relative à une modification de l’enregistrement du sexe dans les actes de l’état civil : les trois coupoles régionales LGBTI+ (Arc-en-Ciel Wallonie, RainbowHouseBrussels et çavaria) et Genres Pluriels s’insurgent contre les convocations de personnes transgenres par la Police.
Depuis l’entrée en vigueur de la loi en janvier 2018, plusieurs personnes transgenres ont pris contact avec Arc-en-Ciel Wallonie, ainsi qu’avec d’autres organisations LGBTI+ belges, concernant leur convocation par les services de Police suite à leur première déclaration de modification de “l’enregistrement du sexe”.
Selon les premiers témoignages recueillis via la plateforme ‘Espace Presse Transgenre’, ces convocations auraient eu lieu exclusivement en Wallonie, notamment dans les arrondissements judiciaires de Liège, du Hainaut ainsi que du Luxembourg. Lors de cet interrogatoire mené par un fonctionnaire de Police, des questions intrusives et personnelles sont posées aux personnes concernées. Des questions telles que « ça fait longtemps que vous êtes comme ça ? » ont été posées aux personnes concernées dans le but de « vérifier le bien-fondé de [leur] demande » et « si la personne est stable [selon] le policier ». Des questions d’ordre médical ont également été posées aux personnes convoquées.
Arc-en-Ciel Wallonie, la RainbowHouse Brussels, çavaria et Genres Pluriels dénoncent ces pratiques qui violent le droit à l’autonomie personnelle et le droit à l’autodétermination, fondements de la loi du 25 juin 2017. Rappelons qu’en vertu de cette loi (chap. 3, §4), les Procureurs du Roi ont 3 mois pour rendre un avis positif ou négatif concernant cette demande. Les procureurs doivent uniquement s’assurer, comme en amont d’autres procédures de modification de l’état civil, que ce changement n’est pas contraire à « l’ordre public ». Ils ne sont aucunement chargés de déterminer, au moyen d’interrogatoires policiers, si une personne transgenre s’identifie « vraiment » à un genre différent de celui qui lui a été assigné à la naissance et si cette personne est suivie médicalement ou non.
Selon nos informations au sein du Parquet du Procureur du Roi de Liège, suite à une décision prise au sein du réseau d’expertise de droit civil en janvier 2018, une apostille a été transmise au(x) chef(s) de zone de la Police locale de certains arrondissements judiciaires. Celle-ci leur demande de convoquer systématiquement les personnes transgenres ayant fait une première demande à l’administration communale.
Nos organisations dénoncent une grave dérive qui menace de dénaturer une loi fondée sur le principe de l’autodétermination. La systématicité des convocations et la nature des questions posées tendent à une re-médicalisation des personnes transgenres et même à une judiciarisation de ces dernières, sans aucune base juridique. Traitées en fraudeuses potentielles, elles sont amenées à confier des détails intimes de leurs vies à des agents peu ou pas formés à ces questions. Une fois de plus, malgré les progrès du droit, les personnes transgenres sont stigmatisées, leur identité et leurs récits de vie mis en doute et soumis à l’appréciation subjective d’une autorité autoproclamée.
Nous demandons l’arrêt immédiat des convocations systématiques des personnes transgenres. Dans le cas où des convocations seraient justifiables, au cas par cas, pour clarification dans un souci « d’ordre public », nous demandons aux Procureurs du Roi de rappeler aux policiers les limites du champ de tout interrogatoire, pour rester dans l’application stricte de la loi. Nous déplorons l’absence de préparation et de formation des services du parquet à l’application de la nouvelle loi, qui a abouti à ces pratiques abusives qui en constituent un détournement, aux dépens de personnes transgenres désirant changer « l’enregistrement du sexe ».
Nous relevons cependant que, suite à une demande de dialogue de notre part, le Parquet du Procureur du Roi de Liège s’est d’ores et déjà engagé à modifier l’apostille. Nous demandons d’urgence au Ministre de la Justice de réagir pour que des instructions claires et respectueuses des droits des personnes, y compris du droit à la protection de leur vie privée, soient adressées à tous les Parquets du pays.
Tom Devroye, coordinateur
Arc-en-Ciel Wallonie
17, Jonruelle
4000 Liège
04/222.17.33
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