En lumière

Les politiques ont-ils oublié les revendications de la Pride 2017 ?

publié le 18 mai 2018

Communiqué de presse

Fièr.e.s mais sérieux.se.s : Les politiques ont-ils oublié les revendications de la Pride 2017 ?

Pour toutes les personnes LGBTQI+, la Pride est un moment de joie, où on fait sien l’espace public, où on est visible à la face d’une société qui ne fait encore que nous tolérer. Les insultes et les violences nous le rappellent hélas au quotidien. La Pride est donc une fête ET une manifestation absolument politique.

Tous les ans, le mouvement LGBTQI+ belge, choisit de mettre en avant un thème, et d’y associer des revendications. Les organisations qui souhaitent participer à la Pride signent, avant le défilé, une Charte reprenant nos valeurs, à laquelle ces revendications sont associées explicitement.

À la veille de la Pride 2018, la RainbowHouse Brussels et Arc-en-Ciel Wallonie, coupoles du mouvement LGBTQI+ dans leurs régions respectives, font un premier bilan sur la mise en œuvre des revendications que nous avions portées l’an dernier. Le thème en était « Asile et migration, Crossing Borders ». Notre mouvement n’est pas resté passif. Il a engagé des démarches pour rencontrer les autorités compétentes concernant la situation des personnes LGBTQI+ demandeuses d’asile et des réfugié.e.s.

À ce jour, nous avons notamment rencontré des membres de cabinets ministériels compétents (premier ministre, intérieur), des représentants du Commissariat Général aux réfugiés et apatrides (CGRA), et des représentants des deux plus grosses fédérations de centres d’accueil du pays (Fedasil et la Croix-Rouge francophone).

Nous entendons poursuivre le dialogue. Nous devons, à ce jour, faire les constats suivants.

Nous demandons des efforts pour harmoniser les pratiques en vigueur dans la procédure d’asile et pour permettre une évaluation juste des persécutions, évitant de se baser sur des visions caricaturales et ethno-centrées occidentales de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre. Du côté du CGRA, qui dispose de coordinatric.eur.s « genre », et effectue, plus que la majorité de ses homologues européens, un suivi des demandes d’asile LGBTQI+, un vrai dialogue est ouvert pour que ces avancées bénéficient à tous.te.s. Du côté du gouvernement en revanche, nous attendons encore de pouvoir engager de vraies discussions sur les moyens à mettre en œuvre pour que de réels efforts de formation et de doctrine soient faits.

Nous demandons une révision de la politique en vigueur concernant les soi-disant « pays sûrs », dont la détermination relève des Ministères des Affaires Étrangères et de la Sécurité et de l’Intérieur, ainsi que du secrétariat d’État à l’Asile et la Migration. La liste des pays sûrs comprend actuellement l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Macédoine, le Kosovo, la Serbie, le Monténégro, l’Inde et la Géorgie, des pays où les cas de persécution contre les personnes LGBTQI+ restent dans de nombreux cas avérés. Nous restons en attente d’un vrai dialogue avec le gouvernement sur ces questions.

Nous demandons des avancées dans les négociations sur la politique commune de l’asile en Europe. Les négociations européennes à ce sujet sont actuellement bloquées, alors que des avancées sont en jeu, notamment pour la prise en compte adéquate des persécutions liées au genre, à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre, et pour les règles de sécurité applicables dans les centres d’accueil en Europe. Ce blocage n’est pas imputable à la Belgique, mais nous redisons ici que notre gouvernement devrait redoubler d’efforts.

Nous demandons des aménagements raisonnables pour une prévention réelle des stigmatisations homophobes et transphobes dans les centres d’accueil. Nous avons pu continuer sur ce sujet un travail déjà engagé avec Fedasil, et engager le dialogue avec la Croix-Rouge francophone. Ces deux fédérations reconnaissent le travail encore à mener et permettent d’espérer des efforts constructifs, à l’écoute de notre expérience d’entretiens et de conseils avec les personnes qu’elles hébergent.

Enfin, nous demandons un travail d’inclusion au bénéfice de toutes les personnes demandeuses d’asile et réfugiées. Sur ce point, le bilan que nous dressons est particulièrement sombre. Nous sommes en colère.

Comment garantir le respect de tous.te.s, si les droits fondamentaux des réfugié.e.s en général (unité familiale, titre de séjour valide, accès à l’emploi, à l’éducation, à la reconnaissance des qualifications, à la protection sociale et à la santé, au logement, etc.) sont bafoués ? Comment organiser de bons rapports entre les nouveaux arrivants et le reste de la société, si les lois anti-discrimination ne sont pas appliquées, et si les discours racistes, xénophobes, homophobes et transphobes se multiplient ?

Surtout, comment espérer des efforts sincères quand le Secrétaire d’État en charge de l’asile et de la migration lui-même tient des propos outrancièrement xénophobes ? Quand le gouvernement assume des décisions meurtrières d’expulsion du territoire ? Quand toute une partie de la classe politique oppose régulièrement les personnes stigmatisées sur la base de l’origine ethnique ou nationale ou des convictions religieuses, et les personnes stigmatisées sur la base du genre, de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre, ce qui revient à nier de fait l’existence et l’expérience des personnes LGBTQI+ racisé.e.s ?

Le 19 mai, lors de la Pride, la majorité des partis politiques représentés au Parlement fédéral seront présents dans la parade. Tous ces partis, notamment les partis membres du gouvernement, avaient signé notre Charte et nos revendications 2017. Nous constatons leurs incohérences.

Nous leur demandons, d’urgence, de prendre au sérieux la Pride et de faire honneur à leurs propres engagements !

Signataires :

RainbowHouse Brussels

Arc-en-Ciel Wallonie

 

 

 

Contact

Oliviero Aseglio

Porte-Parole

RainbowHouse Brussels

oliviero@rainbowhouse.be


Joël Le Déroff

Co-président de la RainbowHouse  

joel.lederoff@gmail.com